Champagne : Des couverts à biomasse pour redonner de la MO aux sols sableux

Le couvert est roulé vers la mi-mai au rouleau faca, avec directeurs devant pour guider le couvert et bien l’aplatir.  Photos : Vincent Cuiller

Sur ses sols sableux, Vincent Cuiller, vigneron dans la Marne, implante des couverts depuis 2017 avec un double objectif : faire de la biomasse pour redonner de la matière organique au sol et constituer un paillage pour garder l’eau et l’humidité du sol.

Vincent Cuillier implante des couverts végétaux sur 3,5 ha sur les 5,5 ha de son exploitation basée à Pouillon, dans la Marne. Petite particularité pour la Champagne, le domaine est majoritairement sur sols sableux, des sols pauvres en matière organique (MO). « J’ai commencé les couverts végétaux en 2017 avec un double objectif : faire de la biomasse pour redonner de la MO au sol et constituer un paillage pour garder l’eau et l’humidité du sol », explique le jeune vigneron. Avec, dans le viseur, l’intérêt d’augmenter la qualité du raisin et obtenir le maximum d’arômes dans les vins finis.

Vincent Cuiller a commencé les couverts végétaux en 2017 avec un double objectif : faire de la biomasse pour redonner de la MO au sol et constituer un paillage pour garder l’eau et l’humidité du sol. Photo : Clay McLachlan/claymclachlan.com

Les changements de texture du sol commencent à se voir lors des fosses pédologiques.
Six ans après, les résultats sont là. « Sur les sols les plus pauvres, nous étions à 0,8 % de MO au départ. Aujourd’hui, sur la dernière analyse de sol, les chiffres les plus bas sont à 1,9 ou 2,1. Tous les ans, nous gagnons 0,1 à 0,2. » Même visuellement, les changements de texture du sol commencent à se voir lors des fosses pédologiques : les sols sableux « jaunes » se teintent progressivement en marron dans les 5 à 10 premiers centimètres.

Sur les vins, Vincent Cuillier note également une amélioration en qualité, équilibre gustatif et maturité. « Entre les témoins et les parcelles conduites de cette façon, on note 0,1 à 0,2 de différence sucre/acide. »

Réduire les passages

Vincent Cuiller : "Aujourd’hui grâce aux couverts, le travail du sol est réduit à un voire deux passages selon les parcelles et les années."
Pour atteindre ces objectifs, Vincent Cuillier s’est appuyé sur la pratique des couverts végétaux, mais a également fait évoluer certaines pratiques. À commencer par l’arrêt des apports d’engrais NPK, remplacés par du compost forestier. « Idéalement, on applique le compost forestier (mélange de BRF ou de miscanthus broyé additionné de fumier de bovin ou équin, ainsi que de compost de champignon) après la préparation du sol et on sème dedans », indique-t-il.

Avant la mise en place des couverts, la pratique du domaine était axée sur le travail du sol avec six à sept passages par an. « Aujourd’hui grâce aux couverts, le travail du sol est réduit à un, voire deux passages selon les parcelles et les années. »

Le semis est effectué après les vendanges. « Au départ nous semions tôt avant vendanges, en août, mais comme mon objectif est de faire de la biomasse, nous nous sommes rendu compte qu’il était préférable de semer lorsque la pluie est assurée. » Le choix des espèces s’est orienté vers la féverole et le seigle, trèfle d’Alexandrie et trèfle blanc. « Nous avons testé sept ou huit espèces, mais ces deux-là sont celles qui fonctionnent le mieux. L’avoine, par exemple, engendrait un couvert trop bas et favorisait le risque de gelées », signale le vigneron. Avec féverole et seigle, le couvert est bien développé et atteint 2,10 m.

4 à 9 t de MS

La biomasse produite varie entre 4 à 9 t de MS, selon les données issues de la méthode Merci. La largeur de semis est désormais de 42 à 45 cm dans les vignes étroites du domaine (1 m de large). « Nous semions plus large à 60 cm au départ, mais nous nous sommes rendu compte que, lorsque le couvert grandit, il prend beaucoup d’espace. Donc nous avons préféré réduire la largeur et augmenter la densité de semis : de 50 à 60 kg/ha au départ, nous tournons autour de 100 kg/ha aujourd’hui », estime-t-il. Le semis est effectué à une profondeur de 2 cm sur un sol bien préparé avec des disques crénelés pour enlever le ray-grass, souvent problématique dans ce secteur. Il est réalisé à l’aide d’un semoir multigraines classique, mais Vincent Cuillier envisage de passer à un semoir pour semis direct avec deux trémies différentes en fonction de la taille des graines, de façon à améliorer la précision de semis. Le couvert est roulé vers la mi-mai au rouleau faca, avec directeurs devant pour guider le couvert et bien l’aplatir. « Nous avons choisi de rouler au chenillard et pas au tracteur, pour améliorer l’efficacité du roulage et faciliter les travaux ultérieurs », précise-t-il. Le couvert est couché avant la 6e feuille de la vigne, pour éviter toute concurrence hydrique et garder l’humidité. « Cela correspond chez nous à la période où la vigne commence à prendre l’eau du sol », commente-t-il.

La pratique des couverts est désormais bien rodée, mais Vincent Cuiller a d’autres pistes d’amélioration. « Pour l’instant, le couvert est uniquement implanté sur l’interrang. Nous aimerions couvrir le rang, mais dans nos vignes basses, ce n’est pas évident. Nous essayons d’année en année par la taille douce de monter progressivement les pieds à 60 cm. L’idée serait alors de mettre en place un couvert en plein un rang sur deux, avec des espèces adaptées bien sûr, comme peut être le plantain lancéolé », conclut-il.

Le domaine sert de lieu d’expérimentations et de suivis, notamment par l’Inrae.

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